Alfred Schnittke 1934-1998
Alfred Schnittke 1934-1998
Les deux sonates pour violoncelle et piano. Klingende Buchstaben. Improvisation pour violoncelle seul. Madrigal in memoriam Oleg Kagan.
Viviane Spanoghe (violoncelle), Jan Michiels (piano).
Si la production orchestrale d'Alfred Schnittke, extrêmement hétérogène sur le plan stylistique, a parfois mal vieilli, tel n'est pas le cas de sa musique chorale, qui a gardé intact son potentiel d'influence. Celui de sa musique de chambre est plus complexe. Dédiée à Natalia Gutman, la Sonate pour violoncelle et piano n°1 (1978) est marquée par l'obsession de Schnittke pour les petites unités d'expression musicale, et par son aspiration à une manière d'hyperbole. Deux figures basiques de la musique tonale (la tierce majeure/mineure et la cadence parfaite) y sont comme sublimées, le compositeur explorant sans cesse leurs oscillations, tandis que l'intervalle de septième diminuée, gonflé à l'excès, devient sinistre et absurde.
La Sonate n°2 (1997) fut dédiée à Mstislav Rostropovich. Cinq brefs mouvements font alterner de déchirants monologues du violoncelle et un discours plus compact et envahissant des deux protagonistes, où le piano, comme dans la sonate de Debussy, garde un rôle de ponctuation que de véritable interlocuteur. Remarquablement soutenue par Jan Michiels, Viviane Spanoghe défend avec énergie ces deux substantielles sonates, qui supporteraient cependant lectures un peu plus subtiles.
Les trois pièces pour violoncelle seul insérées au centre du programme sont d'une autre nature. L'amusante pochade Klingende Buchstaben (1988) et l'Improvisation virtuose dédiée à Rostropovich (1994) s'effacent derrière les neuf minutes de Madrigal in memoriam Oleg Kagan (1991): ici, Schnittke nous fascine par une expression tour à tour intime et fougueuse, étourdissante en surface mais manifestement inquiète et nostalgique en profondeur. Viviane Spanoghe s'y montre particulièrement inspirée.
Patrick Szersnovicz - Diapason - février 2019
